On va donc voir (à nouveau) ce que la destruction d'un régime arabe, planifiée par les néoconservateurs depuis des années, va produire. Assad a finalement été défait. Son régime usé, isolé par les sanctions occidentales empêchant la reconstruction des infrastructures du pays, à l'armée affaiblie et divisée et aux populations fatiguées par des années de guerre, de pauvreté et d'incertitude, était condamné.
La pression simultanée directe de la Turquie, des milices islamistes ANS et HTS armées et équipées par la Turquie et les État-Unis et la décapitation du Hezbollah par Israël ont eu raison de lui. L'Iran a lâché son "axe de la résistance" et a trahi Assad sans aucun effort et probablement à la suite d'un accord avec la Turquie. Quant à la Russie, elle ne pouvait tenir seule à bout de bras un pays dirigé par un autiste refusant tout travail sérieux avec la Turquie (malgré ses efforts en ce sens), s'en remettant uniquement à l'Iran et attaqué de partout. Elle a dû se résoudre à laisser l'État syrien s'effondrer. Ni l'Iran ni la Russie ne pouvaient se laisser aspirer dans un conflit sans perspective, sans faire le jeu de leurs adversaires géopolitiques.
Assad était devenu impossible à sauver et il est probable que ces deux pays aient reçu des garanties sur la possibilité d'une transition pouvant stabiliser la situation avant un possible glissement vers une situation à la libyenne.
Du point de vue français et européen, la stabilisation du périmètre méditerranéen via des États en paix les uns avec les autres, doit rester la ligne à suivre. Il est sans doute superflu de rappeler qu'en ce sens, la stratégie de regime change des néocons au Proche et Moyen-Orient est à rebours de nos intérêts si elle débouche sur de l'instabilité, des guerres civiles et des déplacements de populations (comme c'est fréquemment le cas). La politique des néoconservateurs visant, pour l'essentiel, à permettre à Israël de se doter d'une profondeur stratégique et d'un environnement immédiat fragilisé. Le Liban est probablement le prochain domino.
Publié sur X par Laurent Ozon, le 8/12/2024
Laurent Ozon est essayiste, il dirige l'entreprise Strargum (recherche et analyse de données techniques et scientifiques, argumentaires pour l'aide à la décision et à la négociation, à l'intention des décideurs en situation d'urgence)
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